Manger du fromage, c'est bon pour la santé
Seize mois de travail ont été nécessaires pour compiler les résultats issus de 2 500 études scientifiques sur les effets positifs et négatifs de la consommation de fromages sur la santé humaine. L’ouvrage, présenté officiellement à l'Académie de médecine, mi-octobre, a ainsi fait l'objet d'un débat nourri autour de l'impact des fromages sur le microbiote, les allergies, les maladies cardio-vasculaires ou infectieuses ou encore sur le cancer. Avec toujours, la volonté de s'extraire du schéma manichéen du tout bon ou tout mauvais. « Les risques sont souvent surexposés dans le discours public, alors que les bénéfices, à plus long terme, sont plus difficiles à cerner. Or les recherches médicales qui s’intensifient depuis une dizaine d’années sur le rôle du microbiote intestinal soulignent l’importance pour notre santé et notre bien-être d’une alimentation riche en microflores variées. Ce livre blanc devrait permettre ensuite d’établir des éléments de langage pour les professionnels, le corps médical, les consommateurs, les médias… », explique le chercheur.
Qu'apprenons-nous dans ce livre blanc ?
D'abord sur le microbiote, Cécile Laithier, chef du service qualité du lait à l’Institut de l’élevage, rappelle que la consommation de fromages induit un accroissement de la diversité du microbiote intestinal et favorise l’abondance des bactéries lactiques. « Dans notre alimentation, le fromage est la première source de micro-organismes vivants, avec des niveaux pouvant atteindre plusieurs milliards par gramme. » Et plus notre microbiote est nourri par de bonnes bactéries, plus notre intestin nous remercie, mais pas seulement. Estelle Loukiadis, directrice scientifique à VetAgro Sup, complète : « Un microbiote sain protège contre des maladies neurologiques, maintient la santé bucco-dentaire, protège contre les maladies cardiovasculaires, participe à la maturation du système immunitaire et protège également contre des dysfonctionnements, notamment liés aux allergies. »
Diminution du risque allergique chez les plus jeunes
Selon l’étude Pasture, la consommation de lait cru, versus de lait UHT, réduit par exemple de 30 % le risque d’infections respiratoires et de fièvre au cours de la première année de vie. Une consommation précoce de fromages, quelle qu’elle soit, est associée à une réduction significative du risque de développer une dermatite atopique. Si en plus elle est diversifiée, le risque de survenue des allergies alimentaires est diminué. « Le fromage au lait cru pourrait représenter un facteur favorable pour la prévention des maladies chroniques en raison de son interaction directe avec le microbiote intestinal et le système immunitaire », commente Sophie Nicklaus, directrice de recherche à l’Inrae. Un postulat qui vaut aussi pour les maladies cardiovasculaires, contrairement aux idées reçues. En effet, les produits laitiers ont longtemps été considérés comme des aliments à risque pour ces maladies en raison de leur teneur élevée en matières grasses et en sel. Pourtant, des travaux récents remettent en cause cette affirmation. Ils montrent que la consommation régulière de 30 à 50 grammes par jour de fromage conduit dans la majorité des cas à une réduction de 5 à 15 % de ces maladies. « Les raisons de l’écart entre ces résultats récents et les observations antérieures résident dans la méthodologie des travaux : analyses de cohortes versus expérimentation animale ; étude du produit complet (le fromage) versus tests sur les composants (matières grasses et sel, notamment) », précise le document. Sur la survenue des cancers, là aussi, le livre blanc relaie plusieurs méta analyses récentes qui mettent en évidence l’effet neutre d’une consommation importante de fromages sur le risque de décéder d’un cancer ou même d’en développer un. « C’est un changement de paradigme puisque la consommation de fromage n’apparaît pas comme surrisque de mortalité et, dans certains cas, serait même un facteur protecteur », avance Estelle Loukiadis.
Revoir en intégralité le colloque
Quid des toxi-infections ?
Sur les maladies infectieuses, le livre blanc précise que les produits laitiers sont impliqués dans 3 % des toxi-infections alimentaires collectives françaises. Là, les quatre fautifs sont connus : Listeria monocytogenes, Salmonella spp., Staphylococcus aureus et les redoutables Escherichia coli producteurs de shigatoxines (Stec). Heureusement, il existe des moyens de contrôler ces risques, et les producteurs de lait et de fromage s’y emploient en permanence. La technologie fromagère est, elle aussi, une pratique de sécurisation sanitaire, par l’abaissement du pH, la synthèse de différents acides organiques par les ferments, dont l’acide lactique, mais également par la synthèse d’autres antimicrobiens efficaces. L’effet barrière des micro-organismes est donc une clé et, à ce titre, la richesse microbienne du lait cru est, par compétition, la première ligne de défense. « Il est essentiel d’adopter des stratégies pour minimiser les risques, mais il faut aussi préserver la biodiversité microbienne des fromages », nuance ainsi Estelle Loukiadis de VetAgro Sup.
Découvrez le livre blanc dans son intégralité
Livre blanc des fromages au lait cru.