SIAM 2025 : La gestion de l'eau, priorité du Maroc
Grand pays agricole, le Maroc est une terre de contrastes où cohabitent de grandes structures modernes et des fermes de taille familiale. Leur dénominateur commun : l'accès à l'eau. Comme une évidence et parce que l'enjeu est vital pour le Maroc mais aussi pour ses voisins d'Afrique, l'eau a été au cœur du salon international de l'agriculture du Maroc (SIAM), organisé du 21 au 27 avril à Meknès. C'est d'ailleurs en marge de ce salon, le plus grand d'Afrique, que s'est tenue une Conférence internationale de Haut Niveau, sur le thème « Gestion de l’Eau pour une Agriculture Durable et Résiliente ».
Aux abords du SIAM, de vastes étendues de prairies et parcours, ponctuées de roches ocres. La frontière entre ville et campagne semble être abolie lorsqu'un troupeau de moutons déambule tranquillement en slalomant entre les voitures. En ce printemps 2025, la campagne marocaine est insolemment verte. Le mois de mars a été très clément puisqu'entre 200 et 400 millimètres d'eau sont tombés sur le pays. Du jamais vu depuis quarante ans. Mais pour la plupart des spécialistes, il s'agit là d'un répit car le mal est profond. Le Maroc demeure en situation de stress hydrique modéré, avec un déficit estimé à 58% par rapport aux niveaux normaux. Alors certes, les pluies des dernière semaines ont permis de reconstituer l'équivalent d'un an et demie de besoins en eau potable, et l'eau stockée dans les barrages a progressé de 45% mais la pénurie reste structurelle.
La ville de Fès au Maroc.
Quelles sont les causes de la pénurie d'eau au Maroc ?
Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène, en premier lieu desquels, le changement climatique, qui s'est accéléré durant la dernière décennie, la croissance démographique, l'urbanisation croissante et l'épuisement des nappes phréatiques. Moins de ressources mais toujours autant de besoins crée une pression croissante entre usages agricoles, industriels, domestiques dans ce pays au climat semi-aride.
Quelle est la politique du Royaume du Maroc en matière hydrique ?
Depuis l'indépendance du Maroc en 1956, l'eau est au centre des préoccupations. La politique de construction de barrages s'est accélérée dès 1969 pour assurer la sécurité alimentaire et le développement économique du pays. Le déploiement du plan Maroc Vert de 2008 à 2020, puis Génération Green a conduit à irriguer 16 % de la surface agricole utile, contribuant à générer 40 % de la valeur ajoutée agricole. Une prouesse rendue possible par la concomitance de deux actions : l'augmentation de l'offre hydrique et l'amélioration de l'efficacité hydrique.
Le Maroc dispose actuellement de 154 barrages collectant 21 milliards de m3 d'eau.
D'ici 2030, par la construction de nouveaux barrages, notamment dans le nord du pays, nous souhaitons récupérer 6 milliards de m3 supplémentaires. Des opérations d'interconnexion, la fameuse autoroute de l'eau, se mettent aussi en place pour organiser la solidarité entre les différents bassins.
Enfin, pour assurer l'alimentation en eau potable des villes côtières, le Maroc ambitionne d'ici 2030 de dessaler 1,7 milliard de m3 en créant des méga-stations du nord jusqu'au sud.
Le Siam à Meknès.
Au SIAM, quelles pistes pour une agriculture plus résiliente ?
80% de l'eau douce est destinée à l'agriculture. Il faut donc faire plus avec moins, voilà l'objectif. Sur l'irrigation, l'enjeu est de passer des systèmes par aspersion à des technologies par gravitation beaucoup plus économe en eau, mais tout aussi efficace pour la plante. On appelle cela l'irrigation de précision : Grâce à des capteurs ou à l'intelligence artificielle, elle permet d'apporter la bonne quantité d'eau au bon moment. De nombreuses entreprises proposant ce type de systèmes exposaient au SIA. Elles pourraient d'ailleurs voir leur carnet de commande grossir, car le ministère de l'Agriculture marocain en initiant le Programme national d'économie d'eau en irrigation (PNEEI) entend généraliser l'irrigation localisée.
D'ici 2030, au Maroc, c'est un million d'hectares qui devraient bénéficier de l'irrigation localisée plus économe en eau, soit près de 200 000 hectares de plus qu'actuellement.
Opération dessalage à grande échelle
La technologie du dessalement s’est imposée comme une solution cruciale à la pénurie d’eau au Maroc. D’ici à 2030, 50 % de l’approvisionnement en eau potable du pays devrait provenir du dessalement. L’eau de pluie sera consacrée à l’agriculture et à l’irrigation. L’usine de dessalement d’Agadir, par exemple, est l’une des plus grandes de la région et joue un rôle essentiel en fournissant une source fiable d’eau douce, indépendamment des précipitations. Deux technologies sont actuellement utilisées au Maroc
Osmose inverse (OI) : Il s’agit de la technologie de dessalement la plus utilisée au Maroc. Elle consiste à forcer l’eau de mer à traverser une membrane semi-perméable qui élimine les sels et autres impuretés. L’usine de dessalement d’Agadir, l’une des plus grandes de la région, utilise la technologie OI pour produire jusqu’à 275 000 mètres cubes d’eau par jour.
L‘électrodialyse: Cette méthode est principalement utilisée pour le dessalement des eaux saumâtres. Elle implique l’utilisation de courants électriques pour déplacer les ions de sel à travers une membrane, les séparant ainsi de l’eau. La première usine de dessalement d’eau saumâtre au Maroc, située à Tarfaya, utilise cette technologie.
Pour faire le tour du SIAM en quatre minutes, on vous a concocté une vidéo tournée sur place. A retrouver ici !
Un Sommet international sur l'eau en marge du SIAM
Le Maroc bénéficie d’une position stratégique entre l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient. Il entretient des coopérations agricoles étroites, notamment avec la France et l’Union européenne. Dans sa bataille pour l'eau, la France et l'Europe en général pourraient être des alliés de poids en accompagnant la transition du Maroc vers une agriculture intelligente face au climat. En marge du SIAM, s'est tenue une Conférence internationale de Haut Niveau, sur le thème « Gestion de l’Eau pour une Agriculture Durable et Résiliente », le 22 avril à Meknès.
Dans son allocution d’ouverture, le Ministre de l'Agriculture a souligné que cette conférence s’inscrit dans la continuité des efforts du Ministère pour la mise en œuvre de la stratégie « Génération Green 2020-2030 » et le « Programme National d’Approvisionnement en Eau Potable et d’Irrigation 2020-2027 » à travers la réalisation des actions concrètes de mobilisation et de valorisation de l’eau agricole, afin de renforcer la durabilité de l’agriculture marocaine et d’en réduire la vulnérabilité face aux aléas climatiques. Il a notamment évoqué le Discours Royal du 29 juillet 2024, prononcé à l’occasion de la Fête du Trône, dans lequel le Roi Mohammed VI a appelé à une réflexion innovante et stratégique en vue de garantir l’accès pour tous à l’eau potable et de couvrir, à terme, au moins 80 % des besoins d’irrigation à l’échelle nationale, quelles que soient les circonstances.
Les chiffres clés du SIAM
● 1 400 exposants issus de 70 pays
● 900 000 visiteurs sur 6 jours
● 18 hectares de superficie d’exposition
● + 40 conférences et tables rondes
● 1 pays à l’honneur chaque année : la France en 2025
BONUS : on vous emmène au SIAM en vidéo dans notre dernier épisode BOUZZ !